José Luis Munuera Montero (40 ans) a reçu le titre de meilleur arbitre espagnol, une distinction décernée par ses pairs. Il s’est entretenu avec AS.
Je dois commencer par une question obligatoire : Tout va bien, José Luis ? (¿Todo bien, José Luis?, en référence à un échange au micro du VAR lors d’un Clasico)
Elle est bonne, mais déjà un peu éculée (rires). Je n'ai aucun problème avec ça. Je suis conscient qu'elle a été laissée pour l'éternité. Finalement, il faut prendre les choses avec humour et les relativiser. Le temps a passé depuis, il faut aller de l'avant.
Cette phrase vous a-t-elle marqué ?
C'était un moment médiatique très fort. L'arbitre doit être prêt à y faire face. J'ai toujours dit que l'une des qualités des arbitres de première division devait être la force mentale. Dans ces moments intenses, ça nous a beaucoup aidés à relativiser, à devenir plus forts et à voir les choses avec du recul.
Vous êtes désormais le meilleur arbitre espagnol.
Oui, le CTA m'a décerné le prix Acebedo. Ça m'a fait très plaisir car c'est un prix qui vous est décerné par vos proches. Il vient de ceux qui, semaine après semaine, vous instruisent, vous conseillent, vous réprimandent, essaient de vous rendre meilleur... Ça me rend fier. Mais on n'est pas si bon quand on l'obtient, comme on n'est pas si mauvais quand on a une mauvaise passe.
Comment se passe le début de la saison ?
Sur le plan personnel, nous sommes heureux. Au niveau national, nous travaillons bien et avec beaucoup d'enthousiasme. Ce que nous aimons faire, nous l'affrontons avec enthousiasme et envie.
Le Comité vous a-t-il tiré les oreilles pour le match Atlético - Real Sociedad ?
(Il y a eu une controverse parce qu'il a fait appel au VAR pour une éventuelle main et qu'il a maintenu sa décision de ne pas la signaler. Il n'a pas arbitré pendant quelques journées ensuite).
C’est une coïncidence. Il y a des arbitres qui enchaînent deux journées de match consécutifs et d'autres qui se reposent. Tout n'est pas comme on le dit. Ce sont des actions qui se produisent et qui sont interprétées. Il n'y a pas lieu d'y donner plus d'importance.
Il est pourtant de plus en plus rare qu'un arbitre maintienne sa décision après appel du VAR.
Quand le collègue du VAR vous demande d'aller voir l'action, c'est parce qu'il veut que vous alliez voir une chose que vous n'avez pas remarquée ou que vous avez clairement pénalisé quelque chose qui n'était pas là. Ce qu'il ne faut jamais oublier, c'est que la décision finale et celle qui doit primer est celle de l'arbitre sur le terrain. S'il considère que l'action doit être maintenue, selon les critères établis, il ne se passe rien. Il peut aussi arriver que le VAR se trompe.
Que pensez-vous de l'affaire Negreira ?
J'espère qu'une décision sera bientôt prise et que le juge classera l'affaire. Si quelqu'un a fait quelque chose qu'il n'aurait pas dû faire, il doit le payer. Qu'ils assument leurs responsabilités. S'il est prouvé qu'il ne s'est rien passé, ils nous laisseront enfin tranquilles et l'ombre de la culpabilité s'effacera, mais les terribles dégâts resteront. Ils ont fait beaucoup de mal aux jeunes générations parce qu'ils ont jeté une ombre sur le collectif des arbitres. Le dommage est brutal.
Le juge déclare dans son jugement qu'il existe une corruption systématique dans le football espagnol.
Si le juge a dit ça, qu'il a des preuves et qu'il met sur la table un doute qui, pour lui, est objectif, je suppose que les personnes impliquées seront désignées. Si c'est le cas, ceux qui l'ont fait doivent payer pour ça. Nous sommes calmes à cet égard.
Vous sentez-vous persécutés ?
Non, mais je pense que cela rend notre travail plus difficile lorsqu'il y a un courant médiatique aussi fort qui braque les projecteurs sur les arbitres sans aucune preuve, sans aucun élément de preuve et simplement parce qu'ils parlent. Cette pression est quotidienne. Nous sommes un collectif honnête, travailleur et respectueux. Vous ne nous verrez jamais répondre de manière négative ou instiller des doutes sur un organisme ou un groupe. Au contraire, nous sommes ouverts pour discuter, parler et clarifier quoi que ce soit. Ce n'est pas que nous nous sentions persécutés, mais il y a certaines pierres qui sont mises dans le sac à dos pour insuffler des doutes. Ça n'aide pas l'image de LaLiga au niveau national et international. Ça ternit le football espagnol. A ce jour, il n'y a aucune preuve contre un collègue.
Pensez-vous que les joueurs connaissent bien les règles ?
Il y en a qui vous surprennent (rires), qui font un commentaire et vous voyez ce qu'ils savent. Mais j'aimerais qu'ils les connaissent un peu plus. Moi je soucie de savoir quels sont leurs systèmes de jeu, leur dynamique, leur phase d'attaque, leur façon de défendre sur les corners... Nous sommes là pour tous ceux qui veulent apprendre. Nous n'avons aucun problème à expliquer les choses. Pendant le match, ce n'est pas le moment d'expliquer une règle à un joueur, mais nous sommes prêts à le faire après.
Les mains semblent susciter moins de controverses cette saison, mais en revanche les penaltys…
Les critères de la commission sont clairs depuis l'année dernière. Un penalty doit être un penalty. Un penalty est une décision très importante. Un grand pourcentage de ce penalty sera un but. Ce que le Comité transmet, c'est que ces actions doivent être énergiques et convaincantes. Nous ne pouvons pas pénaliser ces contacts très légers qui, avec tant de caméras, paraissent plus intenses qu'ils ne le sont en réalité.
Sur le terrain, les joueurs simulent, puis sur le VAR, ils paraissent plus rapides sur certains plans et plus lents sur d’autres…
Je suis tout à fait d'accord. C'est pourquoi il est si important d'avoir des critères de pénalité aussi élevés. Ainsi, lorsque le collègue du dessus voit un très léger contact, nous l'aidons à dire qu'il le voit de la même manière. En revanche, si nous sanctionnons ce type de contact léger, nous mettons en difficulté le coéquipier qui se trouve au-dessus de nous. Nous indiquons un contact et le joueur au-dessus doit évaluer l'intensité. C'est pourquoi il est important, comme le souligne Luis Medina, que nous soyons précis à 200% sur le terrain. Nous ne pouvons pas dépendre du VAR pour sanctionner les choses sur le terrain. Le VAR est là pour aider, pour que lorsqu'il y a une erreur claire et évidente, comme un ange gardien pour vous sortir du trou.
Mais si on ne sanctionne pas sur le terrain, on relègue au second plan le problème de savoir si le VAR le signale ou non. À moins qu’on vous avertisse au micro ?
C'est la clé. L'arbitre sur le terrain dit ce qui se passe : "Il y a un contact entre le défenseur 8 et l'attaquant 9. Je le vois, mais il ne me semble pas suffisant pour que la conséquence soit une chute". Les joueurs apprennent également à jouer avec le VAR. Ils restent au sol pendant cinq minutes, ils mettent la main sur leur genou...
En fin de compte, c’est difficile de faire ce qu’il faut avec des joueurs qui simulent et exagèrent. C'est un peu contraire à l'éthique.
Le joueur qui exagère le contact et le joueur qui simule ne devraient avoir aucun avantage. C'est absurde. Si l'arbitre commet une erreur et siffle un penalty, le VAR va intervenir. Il faut parler au joueur qui simule un penalty et lui expliquer les règles du jeu et le protocole du VAR.
Florentino Perez a dit que personne ne sait comment les lignes du VAR sur les hors-jeu sont tracées.
Je ne sais pas combien de fois Carlos Clos l'a expliqué, mais plus d'une centaine certainement. Il y a eu beaucoup de discussions et de séances d'entraînement sur le système de lignes. C'est un système professionnel et précis.