Marcelo, Danilo et Jesé pourront le certifier, depuis lundi, ça court vite et longtemps du côté de Montreal. La faute à qui ? À un certain Antonio Pintus, nouveau préparateur physique madrilène.
"À mon époque, si tu terminais l'entraînement en ayant mal, on te disait que t'avais bien travaillé", regrettait Carlo Ancelotti il y a quelques années. Résultat, Carletto a fini sa carrière perclus de douleurs. Au moment de devenir entraîneur, il y a fort à parier qu'il s'est bien gardé de ne pas détruire le corps de ses joueurs... sans pour autant les ménager. À cette époque des anni novanta, la Serie A est le meilleur championnat du monde. Et la meilleure équipe, c'est la Juve de Zidane, Davids, Del Pierro et "associés". Sauf qu'en février 99, cette Juve galère sérieusement. Lippi est remercié, et c'est Carlo Ancelotti qui débarque sur le banc de la Vieille Dame. Dans ses valises, Antonio Pintus, son préparateur physique, chargé d'en faire baver aux joueurs avec des méthodes épuisantes. C'est là que Zidane et Pintus vont faire connaissance. Dix-sept ans plus tard, à la recherche d'un faiseur de physiques, ZZ arrache Pintus à l'Olympique Lyonnais, avec lequel l'Italien venait de s'engager. Prêts à souffrir ? Rassurez-vous, Pintus n'est pas au niveau du Profe Ortega, qui finit par faire vomir les joueurs de l'Atlético.
Un polyglotte qui n'a pas la science infuse
Peut aimer son préparateur physique, celui qui sait comment vous faire cracher vos tripes, vous laisser au bord de l'évanouissement ? Visiblement, on le peut, si on s'appelle Zidane ou Deschamps, et qu'on est maintenant coaches. Tous deux ont bénéficié des services de Pintus à la Juve, et l'ont ensuite intégré à leur staff. Deschamps avait appelé l'Italien à Monaco et à Marseille, lorsqu'il en était l'entraîneur. À 54 ans, le natif de Turin a déjà bourlingué pas mal en Europe. Trois clubs en Italie, trois clubs en France (Ol, OM, Monaco), trois en Angleterre, tout en étant passé par le monde du judo et de l'athlétisme. Ses diverses expériences ont fait ressortir un mot spécifique de son vocabulaire : adaptation. "La méthodologie de travail Antonio Pintus c'est l'adaptation à la situation. J'ai eu la chance de travailler dans différents clubs, et je pense qu'il ne faut jamais penser avoir la vérité dans sa poche. Il faut avoir beaucoup d'humilité et essayer de s'adapter aux différentes cultures", déclarait-il en 2010.
À l'ancienne
Malgré cette volonté de s'imprégner de la culture footballistique locale, Pintus est attaché à certaines idées, en bon partisan qu'il est de la “vieille école”. "En France, on fait encore un travail foncier. On fait courir les joueurs pendant la préparation, avant le championnat. En général, en Angleterre, en Italie, le travail foncier qu'on fait là en France, on ne le fait plus, parce qu'on pense que le travail avec le ballon est suffisant pour mettre en forme un joueur. À mon avis, la vérité est au milieu. Il faut quand même travailler sans le ballon" théorise-t-il à l'encontre des Guardiola, Mourinho et compagnie, qui refusent de travailler sans ballon, ou même de faire de la préparation physique spécifique. Mourinho par exemple, utilise ce qu'on appelle la périodisation tactique. On travaille le physique, la technique, le mental et la tactique en même temps au-travers d'exercices. Pour ce faire, présence du ballon obligatoire !
Zidane, lui, ne concorde pas avec les périodisateurs. Quand il a décidé de passer ses diplômes d'entraîneurs en France, le Real s'est alarmé, estimant que les meilleures écoles se trouvaient en Espagne. Précisément, parce qu'on y apprend à intégrer la préparation physique aux exercices avec ballon. Cependant, Zidane a insisté et a suivi les cours à la DTN en France. Et comme les directeurs historiques de la DTN sont Aimé Jaquet et Gérard Houllier, on applique toujours la recette du succès de 1998, selon laquelle on gagnait avec des joueurs forts, disposés à tout casser (recette en vigueur en Italie durant les 90's, où beaucoup de Bleus jouaient, et où Pintus officiait, rappelez-vous). Voilà, on comprend maintenant pourquoi Zidane et Deschamps apprécient Pintus. Juste à titre de parenthèse, la Ligue 1 porte toujours les stigmates de ce mode de pensée, elle qui privilégie les joueurs puissants, et se retrouve alors avec un jeu famélique. En Allemagne ou en Espagne, ça fait longtemps qu'on a misé sur un autre type de joueurs. Demandez à l'exilé Antoine Griezmann...
Fin de l'entraînement. On enlève les crampons, on enfile les baskets, et on court autour du terrain pendant de longues minutes, en suivant le rythme dicté par le chauve au nom de gladiateur romain. Zidane fait la voiture balais. Il avait pesté contre les lacunes physiques des joueurs que lui laissait Benítez en janvier ? Cette fois, ça n'arrivera pas.