Honoré pour sa grande saison lors du gala France Football lundi dernier, Thibaut Courtois, qui a reçu le trophée Yachine, a accordé une interview au quotidien L’Équipe. Extraits choisis.
Gardien, un poste à part : "Moins qu'avant. Le gardien moderne n'est plus juste là pour sauver des buts. Ici à Madrid, je dois aussi commencer le jeu. C'est moi qui, avec la première passe, vais décider comment on va mettre en place l'attaque ou comment on va se sortir de la pression adverse. Aujourd'hui, t'es presque meneur de jeu. Les gardiens sont beaucoup plus importants que ce qu'on peut croire. Mais, naturellement, ça reste un poste spécial."
Les gardiens au Ballon d’Or : "Si tu regardes les tops 10 du Ballon d'Or ces dernières années, les gens votent plus vite pour un attaquant qui marque des buts que pour un gardien. C'est dommage. Mais on va continuer de prouver que les gardiens sont vraiment importants. Autant que les attaquants. Mais sans un bon gardien, ton équipe ne gagne pas de trophée. L'attaquant peut rater six fois, mais son équipe va gagner 1 à 0 avec son but et il sera peut-être élu l'homme du match. Le gardien peut sauver plein de buts à 1-0 et on ne pensera pas pareil. Même les défenseurs sont un peu oubliés, d'ailleurs. On n'en trouve presque pas dans les classements des récompenses et je trouve ça un peu dommage.
Gardien, un rôle ingrat ? "Parfois. Mais tu vois dans la presse, chez les supporters qu'ils apprécient de plus en plus les grands gardiens. L'année passée, si on a gagné la Ligue des Champions, ce n'est pas seulement grâce à Vinicius, Valverde, Benzema ou Rodrygo. C'est aussi grâce à Courtois."
S’il a déjà eu des regrets d’avoir choisi ce poste : "Non, jamais. J'ai bossé pour arriver là où je suis aujourd'hui. J'ai vécu beaucoup de jolis moments dans ma vie grâce à ce poste. Je ne regrette rien."
La concurrence, pas forcément bonne pour les gardiens : "Si tu as deux gardiens de même niveau, que le titulaire commet une faute et que, tout de suite, tu fais entrer l'autre, ça n'aide pas pour ta confiance. Les joueurs de champ jouent quatre-vingts minutes, se font remplacer, deviennent remplaçants au match d'après parce que le remplaçant a marqué. C'est courant et ça peut fonctionner. Mais tu ne peux pas faire ça avec un gardien."
Le poste de gardien, celui qui a le plus évolué ces dernières années ? "Oui, c'est sûr. Il y a vingt ans tu pouvais être dans le but, sur ta ligne, et personne ne te demandait rien. Il y avait un libéro devant toi qui te sortait les ballons de l'espace et voilà... Aujourd'hui, le gardien ne se contente pas de tirer, il "commence" le jeu. Ou alors c'est le défenseur qui te met la passe et tu commences à dribbler et tu fais le choix. Parfois, tu peux faire un grand match, sans avoir fait aucun arrêt."
Cela peut-il encore vraiment évoluer ? "Bonne question... Difficile à dire. Le gardien pourrait intégrer la ligne de quatre et se mettre très haut avec les défenseurs. Mais, même ça, on le fait déjà. Peut-être que grâce à notre taille, on pourrait mettre des buts sur corner. J'ai très envie de marquer. Il y a quelques années, j'avais mis une tête contre Valence, le gardien l'avait sauvé et Karim avait marqué. Parfois, je pense qu'avec mes deux mètres, je pourrais en mettre un. Mais après, s'il y a un contre, ça peut être chaud. Peut-être que si on se revoit dans cinq ans ç'aura encore changé."