Il existe des histoires d'amour impossible. Le genre de relations où les paramètres de vie rendent la cohabitation et le partage compliqués. Malgré des sentiments noués depuis l'enfance, la finalité n'aura pu être celle escomptée par Álvaro Morata. L'espagnol quitte le Real Madrid une seconde fois, pour l'Angleterre (Chelsea) et devient le joueur du Real Madrid le plus cher de l'histoire.
Ils s'étaient pourtant laissé une seconde chance mais l'exacerbation fut trop rude à contenir. Álvaro Morata s'en va l'esprit contrarié avec le sentiment du travail inachevé. Même si ses premiers mots furent positifs accompagnés d'un sourire esquissé, nul doute des remords enfouis à l'intérieur du jeune homme.
Le futur Raúl que le madridisme attendait
Il l'a répété à de nombreuses reprises, Morata est un fan inconditionnel de la légende madrilène. Et comme le destin est incroyablement bluffant, le désormais joueur de Chelsea avait tout pour lui ressembler dés le plus jeune âge. En effet, comme son idole, Álvaro a été formé chez le rival de l'Atletico Madrid où il a côtoyé Koke ou encore David De Gea très petit. Après un changement d'entraîneur dans les catégories inférieures, l'attaquant s'installera en banlieue pour rebondir à Getafe où il brillera pour sa seule année qui le mènera au Real Madrid.
Ses performances au sein de la Fábrica ne se feront pas attendre. Intégré en U17 à son arrivée, Morata alternera avec les U18 et U19 très souvent et commencera à enfiler les buts à chaque rencontre. Avec un championnat remporté et une finale de coupe du Roi avec cette même catégorie, c'est naturellement qu'il intégrera le Real Madrid C (désormais supprimé) afin de continuer sa progression. Ses 34 buts lui ouvriront les portes du Castilla où là encore il marchera sur les traces d'el ángel de Madrid où le but deviendra son meilleur ami.
C'est lors de la saison 2010-2011 que l'avant-centre débutera avec le Castilla sous les ordres d'Alejandro Menéndez. Après un premier exercice plutôt réussie (28 matchs, 15 buts), c'est avec Alberto Toril qu'il explosera littéralement. Aligné aux côtés de Nacho, Carvajal ou encore Jesé, Morata permettra au Castilla de retrouver la deuxième division grâce à une saison de folie où il terminera meilleur buteur du groupe I de Segunda B à égalité avec son coéquipier Joselu. Régulièrement retenu à l'entraînement avec l'équipe première depuis près deux ans alors qu'il n'est âgé que de 17 printemps, Álvarito (le petit Álvaro comme on aime le surnomme à l'époque) compte déjà pour Mourinho qui l'emmène en pré-saison avec le groupe pro où il débutera de manière non-officielle face au Club América en remplaçant Cristiano Ronaldo. La similitude avec Raúl prendra encore plus d'ampleur le 12 Décembre 2012 lors des débuts officiels de Morata à la Romareda contre Saragosse...le même stade des débuts de son idole. En parallèle, le bougre raflera deux Euros (U19 - 2011 et U21 - 2013) en terminant meilleur de ces deux compétitions.
L'équipe première : entre suite logique et consécration
Il ne l'a jamais caché, triompher au Real Madrid a toujours été son rêve. Et pour cela, il s'en est donné les moyens. Depuis ses premiers entraînements lorsqu'il était encore mineur, son entourage avait un souhait qui ressemblait également à une demande : « qu'il joue 5 matchs de suite titulaire... ». Huit ans plus tard, comprenant la parenthèse de deux saisons à Turin, son souhait n'a pu être exaucé. Le nombre s'étant arrêté à quatre (3 matchs de Liga couplés à celui de Supercoupe d'Europe). Son statut d'international n'ayant pu lui permettre d'enchaîner cinq titularisations. Frustrant.
Le travail acharné de Morata aura pourtant été récompensé à de nombreuses reprises grâce à ses buts plus décisifs les uns que les autres. Son premier en match officiel interviendra à Levante lorsqu'à sept (comme un symbole) minutes du coup de sifflet final, à peine entré en jeu, il reprendra un centre de X.Alonso de la tête afin de permettre aux siens de l'emporter lors d'une rencontre cruciale et particulièrement complexe due à une pluie battante qui sévissait sur la région valencienne. Un rêve pour le jeune garçon âgé alors de 20 ans qui considérait alors les prémices d'une carrière madrilène dorée. Seulement, la concurrence féroce durant ces dernières années cumulée à l'éclosion confirmée d'un Karim Benzema, plus mature que jamais dans le jeu, ne permettra pas à Morata de disposer du temps de jeu qu'il souhaiterait. Ainsi, lors de l'été 2014, il quittera le navire pour rejoindre la Juventus Turin pour démontrer l'étendue de son talent.
Après deux ans passés de l'autre côté des Alpes, Álvaro reviendra au Real grandit avec le statut d'attaquant confirmé. Ses exploits lui permettront d'ailleurs de connaître la sélection avec laquelle il disputera l'Euro 2016, preuve une fois de plus d'une réelle progression en marche. Impressionnant, notamment en Ligue des Champions, lors de son aventure italienne, Morata prouvera qu'il est de retour à Madrid pour s'imposer et partira avec les éloges d'une des plus grandes légendes du football, Gianluigi Buffon « Il n'est pas conscient du talent qu'il a et que peu de joueurs ont. Álvaro marque dans tous les matchs importants qu'il dispute, ceci est la marque des très grands » faisant certainement allusion aux buts dans les deux huitièmes face à Dortmund ainsi que lors des deux confrontations face au Real en demies qui permirent à la Juve de se hisser en finale de la LDC 2015 face au Barça ( défaite 1 - 3). Morata étant ainsi devenu (avec Arjen Robben) le seul joueur a marqué lors des deux demi-finale et de la finale dans l'histoire de la compétition.
Un amour inconditionnel
Lorsque, le club décide de le rapatrier l'été dernier, Morata est un maillon fort de l'effectif d'Allegri. Il tente donc de nouveau l'expérience dans son club de toujours. Un club qu'il aime, pour qui il est désireux de prendre des risques malgré des rumeurs le disant réticent à un retour. Challenge accepté avec joie par le compère d'Isco qui malgré une équipe déjà rodée avec un titre de champion d'Europe et un Benzema pratiquement intouchable tentera coûte que coûte de bouleverser la hiérarchie jusqu'au bout comme un bon professionnel. En vain, son ratio impressionnant d'un but toutes les 92 minutes en Liga (second total derrière Messi avec un but toutes les 76) ne suffira pas à faire de lui un incontournable du 11 de Zidane. Ce joueur aimé du vestiaire, toujours souriant, jovial, travailleur et performant manquera à coup sûr à de nombreuses personnes. Ses coéquipiers de toujours l'ont d'ailleurs chaleureusement salué hier et l'attaquant n'a pu retenir ses larmes lors de sa première réaction à chaud.
Comme lors de sa présentation officielle il y a tout juste un an, Álvaro a une nouvelle fois craqué sous l'émotion qui le lie à son club de cœur. Et même s'il ne reviendra probablement jamais comme il l'a annoncé, le madridisme ne n'oubliera pas et se souviendra à vie de ses buts et son amour inconditionnel.
Morata part avec la bagatelle de 97 matchs (seulement 14 entiers) et 30 buts (19 cette saison). Insuffisants pour avoir pu espérer jouer ne serait-ce qu'une seule minute face au Barça ou au Bayern et n'en disputer que deux en quatre matchs face à l'Atletico. A Cardiff, il sera rentré à la 89ème...un temps de jeu dans les matchs couperets bien trop maigre pour un joueur de sa trempe aussi efficace en sortie de banc. Là où certains voient un manque de patience, d'autres comprennent l'ambition que peut avoir un joueur de 24 ans de cette qualité qui ne peut se contenter de n'être qu'un second couteau.